
HISTOIRE &
ARCHÉOLOGIE
La Gascogne épique

Sénebrun (I)
Sénebrun (ou Cenebrun) était le fils de Pison. Il épousa la fille de Duratius, chef celte que César avait nommé proconsul des Lémovices, des Pictons, puis de toute l’Aquitaine1. Duratius intégra Sénebrun à son gouvernement et lui confia « en mémoire de ses aïeuls Princes du pays de Gascogne » la justice sur ce dernier pays, ainsi que la promesse de l’héritage du proconsulat. Lorsqu’à la mort de César l’Aquitaine se souleva, Duratius et Sénebrun soutinrent Agrippa, envoyé par Auguste, puis l’empereur lui-même lorsque d’autres révoltes éclatèrent chez les Cantabres (qui « contiennent les Navarrais, Gascons et Basques »). À la mort de Duratius, Sénebrun et son fils Lucius partirent à Limoges avec des troupes afin de revendiquer l’héritage promis : le proconsulat. Des seigneurs gaulois s’y opposèrent et levèrent une armée, mais Auguste le confirma dans sa charge et promit même celle-ci à son fils Lucius. Avant de mourir, alors qu’il finissait ses jours dans son château de Lesparre où il fut enterré, Sénebrun réunit ses douze fils. Alors qu’il était dans son lit entouré de ses enfants, il se fit apporter un faisceau de douze flèches : il essaya de les rompre, mais n’y parvint pas. Alors il prit les flèches une par une et, chacune leur tout, les brisa. Et il dit à ses fils que comme ces flèches, par leur union ils seraient indestructibles ; mais seuls, ils pourraient être rompu par de pauvres mains malades et tremblantes de vieillesse. L’aîné Lucius lui succéda au proconsulat d’Aquitaine ; les autres gouvernèrent diverses villes2.
Dans d’autres manuscrits, Sénebrun, roi de Bordeaux, était le deuxième fils de Vespasien. Il épousa Gallienne fille de Titus (Titus et Vespasien, empereurs de Rome, étant les fondateurs de Bordeaux). La domination de Sénebrun s’étendit ensuite sur tout le midi de la Gaule. Sénebrun partagea son royaume entre ses nombreux enfants – dont Sénebrun comte de Médoc, son deuxième fils –, mais réserva le droit de suzeraineté sur les autres au royaume de Bordeaux3.
Remarques
Si les versions divergent à propos des origines de Sénebrun, de celle de sa femme et de sa capitale (chaque manuscrit défendant son « camps », Bordeaux ou Limoges), il demeure des liens intéressants : l’importance de Lesparre, le grand nombre d’enfant ou encore l’étendue géographique du territoire qu’il gouverne.
Sénebrun paraît donc comme une sorte de « Père fondateur » duquel descendent tous les princes de Gascogne et d’Aquitaine, notamment les seigneurs de Lesparre chez qui l’on retrouve aux XIIIe et XIVe siècles plusieurs porteurs du nom « Sénebrun » (famille pour qui aurait peut-être été fondée cette légende). D’autres personnages légendaires portent également le nom de Sénebrun.
AUtres heros
Sources, crédits
Auteur :
Textes de Benjamin Caùle (OCG).
Notes :
1 Bonaventure de Saint-Amable : Histoire de St Martial apôtre des Gaules et principalement de l’Aquitaine et du Limousin : troisième partie, Limoges, 1685, p. 10. Ce territoire contrôlé par Duratius, dont Limoges était la capitale, mêle Aquitaine césarienne (entre Pyrénées et Garonne) et Aquitaine médiévale (entre Garonne et Loire), préfigurant la grande Aquitaine augustéenne et surtout le méli-mélo géopolitique qui exista entre la Gascogne et l’Aquitaine au Moyen Âge.
2 Ibid. p. 18-23.
3 Archives municipales de Bordeaux. Tome premier : le livre des Bouillons, Bordeaux, 1867, p. 473.
Sources principales :
– Anonymes : Chroniques de Saint-Martial de Limoges, XIIIe siècle.
– Anonyme : Collection Schøyen Ms. 033, dernier quart XIVe siècle.
– Anonyme : Livre des Coutumes de Bordeaux, entre 1388 et 1399.
– Anonyme : Livre des Bouillons de Bordeaux, 1ère moitié du XVe siècle.
– Anonyme : Livre Velu de Libourne, 2nde moitié du XVe siècle.
Données représentatrices de l’état des connaissances en : août 2022