
Adixatz !

Aumatge tau Bernat Manciet !

Hommage à Bernard Manciet !

« Tends-moi cette main, que j’en lise les lignes. Le pouce, vois, c’est la côte cantabre, et jusqu’à l’index la côte landaise. Ici, regarde, tu as la Garonne, et l’Adour. Entre les deux, rien, sauf de la lande, de la forêt désertes. Sur ce rien, je vaticine. Là subsiste, sache-le, une peuplade bafouée par l’Histoire. Moi, je lui donnerai mieux : de la légende. Elle parle, dit-on, un langage de brutes, inadmissible. J’ai voulu le faire chanter. On l’a considérée comme perdue, morte, avec sa langue, ses coutumes, sa foi. Je l’enterre, mais je l’enterre vivante. Rien. Mais toutefois assez de couleurs, celle des incendies, des nuages violents, des péchés truculents ; et assez d’ombres, celle des pluies interminables, des impénitentes superstitions, des secrets obstinés, pour que j’en gâche le mortier d’un cérémonial exagéré et absurde, puisqu’il va disparaitre avec un peuple, avec son fatras magnifique, Prends garde : n’en sois pas trop sûr. »
Le feu de la langue
Texte : Les Amis de Bernard Manciet/Los Amics de Bernat Manciet
Bernard Manciet a construit son œuvre dans deux langues, l’occitan gascon, et le français. L’une ne se réduisait pas à l’autre. Chacune des deux langues charriant son imaginaire, son émotion, sa texture, et plus encore, un ordre du monde, et un monde sans ordre dans lequel la poésie en particulier, la littérature en général, pouvait se travailler. En poète, il savait que chaque langue est un corps, et qu’il faut entrer dedans pour s’y mouvoir. En poète, aussi, il refusait l’esprit de chapelle et les querelles agitant les partisans d’une langue pure, d’un occitan normé. Car une fois que le poète est dedans, la langue, il la bouscule. Il en attise « le feu ».
« je suis un renard de la langue, disait-il en 1997, et avant d’arriver à faire rentrer un renard dans une cage… »
En poète enfin, il savait que la langue est d’abord un son, une matière à prononcer, clamer, éructer chuchoter, et que c’est dans cette mise en voix qu’elle donne son possible. Aussi a-t-il souvent lu lui-même ses textes, accompagné, parfois, de musiciens. Le voici lisant l’incipit du Gojat de Noveme (Le jeune homme de novembre).
S’il a souffert de ce que l’occitan – qu’il préférait parfois appeler gascon mais dénommait finalement langue d’oc ou occitan, eu égard à ces interlocuteurs – soit enfermé dans une logique de territoire – une façon aimable de la considérer non pas seulement minoritaire mais mineure – il faisait sien son attachement à la terre. Car toute langue est viscérale. Plus que militant, sa persévérance dans la construction d’une œuvre en gascon correspondait à l’enjeu d’un écrivain qui travaille sa langue – et c’est en cela, et en cela seul, que son engagement était politique : tout regard d’écrivain est en soi politique car il est une façon d’être au monde.

Hommage
Pour marquer le Centenaire de sa naissance, plusieurs collectivités territoriales et acteurs culturels de Nouvelle-Aquitaine proposent un programme de rendez-vous particulièrement riche tout au long de la saison 2023-24.
La Région Nouvelle-Aquitaine vous propose de retrouver l’ensemble des initiatives liées à ce centenaire sur une page dédiée à l’auteur landais. Celle-ci sera mise à jour régulièrement durant toute la période de célébration.
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